jeudi, août 30, 2012

Les Frères d'Armes de Sainte Jeanne d'Arc !


“From this day to the ending of the world, but we in it shall be remember'd; We few, we happy few, we band of brothers.” Le discours de la saint Crépin qu’Henry V d’Angleterre adressa à ses frères d’armes au soir de la bataille d’Azincourt ne manque ni de noblesse ni de grandeur. Henry V, immortalisé par Shakespeare, était un roi chaste, pieux, cultivé, habile dans l’art militaire et fin politicien. Azincourt restera à jamais dans la mémoire des Anglais une grande victoire et dans le coeur des Français un bien triste souvenir. Mais voilà ! Cette victoire des frères d’armes du chef de la Maison de Lancastre aura son prix à payer ! La volonté des hommes ne saurait contrer le plan divin. Henry V rêvait d’une France et d’une Angleterre réunies en un seul royaume. La volonté divine était autre. Une jeune vierge, âgée de 3 ans lors de la bataille d’Azincourt, allait redorer le blason des lys et rendre le royaume à son souverain légitime. Menant les armées de Charles VII,  elle lavera l’affront d’Azincourt à Orléans, Jargeau, Meung, Beaugency et Patay. Jeanne fut l’envoyée de Dieu qui lui avait promis ces victoires. Tout comme Henry V, elle ne guerroya pas seule. Elle aussi, avait ses frères d’armes. Ce sont les principaux d’entre eux que nous voulons vous présenter.
Sainte Jeanne d’Arc n’aurait pas pu accomplir sa mission seule, et nous savons que Dieu utilise les moyens humains dans le gouvernement des choses. La vie de notre sainte est remplie de faits surnaturels mais il nous semble que le plus grand “miracle” (nous prenons ici le mot dans son sens large et commun) soit son ascendant sur les hommes de guerre qui l’accompagnaient. Sa grâce, sa simplicité, son humour - elle n’en manquait pas - sa force de caractère ont charmé et conquis ces hommes parfois rustres et certainement peu habitués à être commandés par une femme, du moins en ce qui concerne l’art de la guerre. Pourtant ce sont ces guerriers qui deviendront les plus fidèles compagnons de Jeanne, êtant prêts à mourir pour elle.

Nous ne pouvons hélas en dire autant des politiciens, comme La Trémoille, qui feront passer leurs intérets avant ceux du Roi et de la France, conduisant ainsi Jeanne à sa perte. Quant au clergé... honte à ces hommes d’Eglise qui se sont rangés derrière les politiciens véreux au mépris de la plus élémentaire des justices !

Dieu ne force jamais les coeurs, or il est des coeurs corrompus qui se ferment à la grâce. L’ambition politique, la soif de pouvoir, l’appât du gain corrompent les coeurs et les détournent de Dieu. C’est une constante de l’humanité, quelles que soient les âges et les cultures. Or il est des positions dans le monde qui favorisent de telles dispositions d’âme. D’autres au contraire prédisposent le coeur à recevoir la grâce. Ainsi le guerrier qui risque sa vie pour une cause plus grande que lui et qui côtoie la mort. Attention, nous nous gardons bien de tomber dans une vision qui serait trop simpliste en faisant du politicien un homme mauvais  et du soldat une âme noble par nature. Il n’en demeure pas moins vrai qu’il existe des dispositions naturelles, que la volonté humaine pourra ensuite exalter ou rabaisser. Ainsi, et Dieu merci, il est des politiciens qui sont des hommes de principe et d'honneur. Comment ne pas mentionner saint Thomas More ? Et il est des soldats qui, blasés par la violence en oublient les sentiments de l'humanité, quand ils ne sont pas tout simplement assoiffés de sang. Ce n’est pas un hasard, pensons-nous, si le Christ fut jugé et condamné par les grands prêtres et les politiciens de son temps, tandis que l’on trouve parmi les Légions de Rome des âmes qui auront été saisies par la grâce tel ce centurion dont Jésus admire la foi.

Sainte Jeanne d'Arc rencontre Charles VII à Chinon
Il est à la fois touchant et dramatique de voir combien la vie et la mort de sainte Jeanne d’Arc est une imitation de la vie et de la mort du Sauveur. Jésus est venu établir sur terre un Royaume qui n’est pas d’ici bas. Jeanne a retabli un Royaume, certes terrestre, mais qui est par nature l’expression temporelle du Royaume spirituel du Christ. Elle s’est battu et a donné sa vie pour le Christ et son Royaume: “Mon très illustre maître, je suis venue pour donner secours au royaume et à vous... Et vous mande le Roy du ciel, par moi, que vous serez sacré et courroné dans la ville de Reims; et que vous serez lieutenant à Luy, qui est vray Roy de France.” (Première entrevue avec Charles VII à Chinon) Et dans sa lettre aux Anglais, on peut lire: “ Roy d’Angleterre, faictes raison au Roy du ciel de son sang royal... Vous ne tiendrez jamais la France du Roy du ciel. Mais la tiendra Charles, vray héritier à qui Dieu l’a donnée... Tous ceux qui guerroient au dict sainct royaume de France guerroient contre le Roy Jésus.”

C’est à Blois, alors qu’elle venait de quitter Poitiers où elle avait été entendue par des hommes d’Eglise, que Jeanne rencontra la plupart de ses frères d’armes. L’un d’eux, le premier que nous présentons aujourd'hui, était Etienne de Vignolles, connu sous le nom de la Hire.


Etienne de Vignolles dit la Hire


   Lorsque Jeanne entra dans la ville de Blois, quelques murmures s’élevèrent comme nous le rapportent certaines chroniques. “C’était certes un beau chef qu’on leur envoyait là ; et bien capable de remettre les affaires en bon état “ disait-on avec ironie. ( Chronique du doyen de Saint Thibaud)



Le premier à faire taire les moqueries fut la Hire qui sortant des rangs alla saluer bas la jeune fille et déclara que lui et sa compagnie la suivraient partout jusqu’à la mort. Cela suffit à en imposer à tous tant la réputation de la Hire était grande.


Gascon impétueux au fort tempérament - d’où son surnom - il fut de toutes les batailles. “Jeanne prit un ascendant singulier sur cet homme de fer qui ne craignait personne, pas même le roi, écrit le cardinal Touchet. Il admirait dans la sainte enfant son courage singulier, égal au sien, et tout à côté, des vertus qu’il n’avait pas. Elle le convertit et le déshabitua de blasphémer.” 

Au service du Bâtard d’Orléans pour le compte de Charles VII, la Hire   était considéré comme l’un des plus grands capitaines quand il rencontra Jeanne. Il avait déjà à son actif plusieurs faits d’armes. Citons Crépy en 1419 et Châlon-sur-Marne en 1423. Charles VII l’a nommé écuyer en 1426.

    Le valeureux guerrieux avait  certes la foi mais n’en était pas pour autant un homme de vertu. Ainsi avant la bataille de Montargis en 1427, il demanda l’absolution avant l’assaut en se contentant en guise de confession des mots suivants: “J’ai fait ce que les hommes de guerre sont accoutumés à faire.” 

  Après sa rencontre avec Jeanne, la Hire lui restera fidèle depuis Blois et sera à ses côtés à Orléans, Jargeau, Patay où il commande l'avant-garde, et lors du siège de Paris. Il essaya même de la secourir lorsqu’elle fut prisonnière à Rouen mais il s’est fait prendre lui-même par les Anglais. Libéré contre une forte rançon l’année suivante il retourna sur les champs de bataille et combatit jusqu’à sa mort. Il retomba malheureusement dans ses anciens travers se livrant parfois au brigandage et commettant les pires exactions. N’était-ce pas lui qui avait dit jadis que si Dieu revenait sur terre Il se ferait pillard ? On lui attribue d’ailleurs cette citation: “Un pillage sans incendie, c’est comme une andouillette sans moutarde !” La Hire demeura toujours fidèle au Roi de France malgé tout, mais la sainte n’était plus là pour contrôler ses ardeurs et le conduire dans les voies dans la vertu. Il meurt en 1443 suite a des blessures de guerre. Voici son épitaphe : “ Cy gist noble homme Estienne de Vignolles dit La Hire, en son vivant secuier de l'escuirie du roi et baillif de Vermandois, lequel de son temps servit moult le roy Charles VII en ses guerres, et puis trespassa le onziesme jour de janvier 1443." 


Né : vers 1380 -1390 à Préchacq. 
Mort : le 11 janvier 1443 à Montauban.
Titres nobiliaires : seigneur de Montmorillon (Vienne) et châtelain de Longueville (Seine-Maritime).
Offices civils et militaires : capitaine de Vitry-en-Perthois, capitaine de Vendôme, écuyer d'écurie du roi et bailli du Vermandois, capitaine-général de la Normandie.

Armes : de sable à trois grappes de vigne d'argent posées 2 et 1, chaque grappe accompagnée d'une feuille.





Pour la petite histoire, la Hire est le valet de coeur aux cartes !


(A suivre.....)

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