Quelques considérations en période d'élection !
En fichier audio: Sermon 3e dimanche après Pâques
Depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale, nous entendons beaucoup parler de la construction de l’Europe, et l’intention est certainement bonne: obtenir la paix et la prospérité économique, partager les connaissances scientifiques et les valeurs culturels etc... L’Eglise ne peut voir que d’un bon oeil et encourager de tels projets. En 1948 le Pape Pie XII s’adressait aux Congressistes de l’Union Européenne des Fédéralistes et leur disait:
“Nous sommes très sensible à votre démarche, Messieurs. Elle nous prouve que vous avez compris et apprécié les efforts que, depuis près de dix ans, Nous multiplions sans relâche en vue de promouvoir un rapprochement, une union sincèrement cordiale entre toutes les nations. Soyez-en remercié.”
Sans entrer dans les considérations d’un modèle politique, économique et social particulier, Pie XII rappelait toutefois certains grands principes. Ainsi l’on ne saurait garantir l’union et la paix sans “une base morale inébranlable.” “Si l’Europe veut sortir de ses déchirements, de son malaise et de son inquiétude, demandait-il, ne lui faut-il pas rétablir chez elle le lien entre la religion et la civilisation? ”
L’Eglise catholique a toujours reconnu ce lien profond qui existe entre la religion et la civilisation. En 2002, jean Paul II s’adressait au Parlement italien : “Mon admiration, disait le Pape, n’a fait que croître pour ce pays dans lequel l’annonce évangélique, parvenue ici dès les temps apostoliques, a fait naître une civilisation riche de valeurs universelles et une floraison d’œuvres d’art admirables, par lesquelles les mystères de la foi ont été exprimés dans des images d’une beauté incomparable. Combien de fois n’ai-je pas touché du doigt, pour ainsi dire, les traces glorieuses que la religion chrétienne a imprimées dans les mœurs et dans la culture du peuple italien, et qui se sont concrétisées dans de nombreuses figures de saints et de saintes dont le charisme a exercé une influence extraordinaire sur les populations d’Europe et du monde!”
Et comme son prédecesseur une soixante d’années auparavant, Jean Paul II mettait en garde les parlementaires italiens, et au delà tous les politiques européens:
“Il est donc nécessaire de se garder d’une vision du Continent qui ne prenne en compte que les aspects économiques et politiques, ou qui se laisse aller sans réflexion critique à des modes de vie inspirés par un consumérisme indifférent aux valeurs de l’esprit. Si l’on veut donner une stabilité durable à la nouvelle unité européenne, il est nécessaire de veiller à ce qu’elle s’appuie sur les fondements éthiques qui en furent autrefois la base, laissant en même temps un espace aux richesses et aux diversités des cultures et des traditions qui caractérisent les différentes nations. Devant cette noble Assemblée, je voudrais aussi renouveler l’appel que j’ai adressé ces dernières années aux divers Peuples du Continent: «Europe, au seuil d’un nouveau millénaire, ouvre encore tes portes au Christ !»”
Aujourd’ hui presque tous les politiciens s’accordent sur le fait qu’une Europe unie est nécessaire pour le développement ou même la survie des Nations qui la composent. Certes, on constatera ensuite des divergences quant aux modes et principes qui doivent gouverner à la construction de cette Europe. Sans entrer dans des considérations partisanes, nous dirons à la suite de Benoit XVI qu’il est important que l’Europe reconnaissance d’abord ses racines chrétiennes. Il faut aussi que les Nations qui la composent puissent survivre en tant que Nations et par conséquent conserver un régime de gouvernement qui ne fasse pas d’elles de simples provinces d’un super Etat européen. L’Eglise a toujours reconnu le droit des Nations qui ont chacune leur caractère propre et leur mission, comme le rappelait Joseph de Maistre. Et depuis 2000 ans, l’Eglise, à la suite du Christ, s’adresse aux individus et aux Nations, même si depuis quelques décennies il a fallu qu’elle s’adapte au contexte politique international en reconnaissant l’existence d’institutions internationales auxquelles elle s’adresse aussi, mais toujours en rappelant la primauté des personnes et des Nations justement.
Aujourd’hui, et nous le déplorons, nous ne pouvons plus parler de Nations chrétiennes dans une Europe sécularisée et laïcisée. Il demeure des vestiges culturels, un patrimoine qui se visite hélas dans les musées ou dans les églises qui trop souvent font office de musée quand ce n’est pas pire. L’Europe qui existait jadis et qui avait pour nom Chrétienté n’existe plus. Et c’est une nouvelle Europe que l’on essaie de construire et que l’on veut nous imposer, mais qui ne pourra jamais nous satisfaire tant que les Nations qui la composent ne reviennent pas à leurs racines.
Saint Pierre dans l’épître du jour nous exhorte en tant que pélerins et voyageurs à avoir une bonne conduite parmi les païens. Les païens du temps présent, tout comme ceux des premiers temps de l’Eglise, nous accusent de faire le mal et tous les moyens médiatiques sont bons pour cela. Mais si nous persistons à avoir une bonne conduite, à rendre le bien pour le mal, alors, “ils glorifieront Dieu au jour de sa visite.” Ainsi, en faisant le bien, nous fermerons “la bouche à l’ignorance des insensés.”
Ne nous y trompons pas mes frères, l’election présidentielle qui approche ne changera pas grand chose dans le plus ou moins long terme, car ce qui importe est de revenir à l’essentiel, d’ouvrir les portes au Christ selon l’expression de Jean Paul II. Or en France, Dieu a été banni de la vie publique et politique. Le Christ Roi ne règne plus de par la volonté de nos gouvernants et du peuple plus ou moins éclairé et soi disant souverain qui les ont porté au pouvoir. C’est triste ! C’est dommageable ! Les âmes s’éloignent de Dieu et veulent se bâtir une société sans Lui !
Faut-il pour autant désespérer ? Certainement pas. Au début du XVe siècle, la France était à l’agonie. “Elle périssait faute d’autorité, écrit le Cardinal Touchet ; ni peuple, ni parlement, ni université, ni ducs, ni dauphin, ni reine, ni roi n’en avaient plus. L’impuissance, l’incohérence, l’immoralité civique, pour le moins, étaient partout. La nation française décentrée attendait sa fin ; cent fois pis que cela, elle la souhaitait !” Puis vint l’envahisseur Anglais, Henri V ! “La situation s’aggrava presque jusqu’à perdition.”
En 1422, alors que la dépouille mortelle du roi Charles VI venait à peine d’être ensevelie, le héraut d’arme s’écria selon les paroles rituelles : “ Dieu veuille avoir pitié de l’âme du très haut et très excellent prince Charles, roi de France, sixième du nom, notre naturel et souverain Seigneur !” Puis après une pause, il ajouta: “ Dieu accorde bonne vie à Henri, par la grâce de Dieu roi de France et d’Angleterre, notre souverain Seigneur !”
“Etait-ce donc la fin de la France ? demande le cardinal Touchet, de la France baptisée à Reims par saint Rémy, de la France fille aînée de l’Eglise ?
La réponse, mes frères, nous la connaissons. Et elle vint de la plus extraordinaires des façons. Alors en ce 600è anniversaire de la naissance de notre chère sainte, à quelques jours jours de l’ouverture des fêtes johanniques dans la bonne ville d’Orléans et en d’autres lieux, nous nous souviendrons que le salut vient toujours de Dieu, y compris dans l’ordre temporel. Et tandis que nous sommes toujours dans le temps pascal, nous nous souviendront que notre foi, dont la Résurrection est le fondement, est déjà notre victoire sur le monde !
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